ENSUITE JE TOURNE AUTOUR DE LA MAISON. Un caillou suffirait à crever le vitrage simple des fenêtres, et puis non ; le froid deviendrait un problème : un chiffon isolerait mal, un carton céderait au supplice de la pluie. Je ne saurais pas escalader la façade et tout est clos : même la grange ne communique pas. Trois fois le tour et la tête me tourne. Je change de sens. Le chien s’amuse à mordiller les talons de mes chaussures qui ont piétiné la neige au pied des murs. Comme sous la tiédeur d’un milieu d’après-midi, la terre rend un jus poisseux dans les traces de mes semelles, le même qui reflue autour des plates-bandes, des buissons nus et des objets abandonnés un peu partout sur le terrain. Cette petite crème en gorgeant les ornières alourdit l’atmosphère et mon vertige. Il faut que je rie ; que je puise un peu de courage et de pugnacité dans cette détente hystérique. Je retourne sur mes pas et stationne à nouveau devant la porte d’entrée. Je m’adresse au chien en faisant le clown : « Viens Chinook ! on rentre à la maison, j’allume un feu et je te réchauffe une brisure de riz, ça te va ? » Je le convie d’un geste à entrer et tourne la poignée en poussant de l’autre main. Il s’engouffre et file à fond de train au moment où je réalise que la porte n’était pas verrouillée. Je ramasse mon barda et pénètre à sa suite dans le hall d’entrée.
*Je tourne l’interrupteur en reniflant des odeurs mêlées de maison ancienne, d’âtre éteint, de lavande et de renfermé.
Une réponse à “L’effraction”
Superbe texte
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