Lucas Verdier éteignit son rire nerveux derrière les containers alignés avant de tourner au coin. Mattéo Zitouni lui filera ses soixante balles et puis c’est tout. C’est facile de juger les menteurs, mais on est bien content de les trouver quand on a besoin de sauver son cul.
Elle avait laissé traîner chaque syllabe comme dans une scène d’ivresse.
Il sonna chez Béatrice Vitoux avec l’air sérieux qui convenait à son affaire. Des pies jacassaient sur le terre-plein herbeux devant la maison, leurs cris malgracieux semblant faire écho à son rire.
— Tiens, Lucas… Qu’est-ce que tu fais là ?
— Bonjour, Madame Vitoux. C’est la préfecture qui m’envoie vérifier qu’il n’y a pas le virus chez les gens.
Béatrice Vitoux grimaça de surprise.
— Qu’est-ce que c’est que ces conneries ?
Elle avait laissé traîner chaque syllabe comme dans une scène d’ivresse. Le jeune garçon fit le dos rond. Il insista d’une voix neutre :
— Vous êtes seule ? Célia, elle est pas là ?
Béatrice Vitoux lui fit un clin d’œil mais il ne se troubla pas.
— Elle est chez son père jusqu’à la fin du confinement. Pas trop déçu ?
Lucas se gratta la tête.
— Non mais je suis pas là pour Célia, Madame. Je peux entrer faire ce que je vous ai dit ?
Béatrice Vitoux commençait à s’amuser.
— Tu n’as pas peur que l’un de nous deux contamine l’autre ?
Le gamin avait prévu sa réaction et lui débita sa réponse toute prête.
— Les enfants sont pas contagieux, Madame. Et si c’est nous qu’on chope, ça nous fait rien. C’est pour ça qu’on est bénévoles, la plupart. C’est bon, je peux entrer ?
La mère de Célia se tourna de profil et Lucas s’engouffra chez elle comme dans un film d’action.
Illustration River Phoenix dans Stand by Me