• L’auteur
  • En librairie
  • Interview
  • salons / ateliers
  • Conseil littéraire
  • Contact

Anna de Sandre

  • Vaines épigrammes et pauvres aphorismes #3

    juin 15th, 2014
    Si tu hésites entre un château en Espagne ou des plans sur la comète, sache que dans les deux cas, tu investis dans la pierre.
  • Un paysage ordinaire de Derek Munn

    juin 11th, 2014
    Derek Munn, Un paysage ordinaire, Christophe Lucquin éditeur, juin 2014, 190 pages.

    «(…)J’avais décidé de nettoyer l’étable. Des rayons de soleil tranchaient l’air. J’ai entendu un bruit. Tout de suite j’ai pensé, un ange. Va savoir pourquoi. D’où viennent les mots ? Je me suis arrêté pour écouter. J’avais travaillé sans penser, du coup le calme m’a fait peur. Il y avait de la poussière partout, j’en avais dans la bouche, dans le nez. Elle me remplissait la tête. Après un moment, je me suis entendu respirer. Mes pieds froissaient le sol. Pourtant, j’avais l’impression d’être immobile. Quelqu’un danse en moi, ai-je pensé. Avec toute cette poussière, l’atmosphère était fantomatique. J’avais soif. En travaillant j’avais oublié mon corps, il s’était effacé, il fallait que je récupère. Mes mains serraient le manche du balai, je mâchais de la poussière, j’ai regardé la paille, les cloisons, les mangeoires. Il me semblait qu’il n’y avait plus de couleur,, ou qu’il n’y avait qu’une seule couleur, déclinée dans toutes ses nuances. De l’or flamboyant jusqu’à la sépia. Je ne sais pas combien de temps je suis resté comme ça. Puis il y a eu comme l’écho du bruit. Un ange, une nichée de souris, des rapaces tournant au-dessus des champs. Un cri ultime. Mon nom peut-être. Il venait de loin. Il était en moi. Je ne l’entendais pas, je ne l’avais peut-être jamais entendu. Le silence était un brouhaha constitué d’innombrables bruits, mais il manquait celui que je guettais. Un bruit composé de silence. Soudain, l’étable m’a paru plus petite, plus terne. La poussière, la paille. Le regard d’une bête. J’avais à peine avancé, je m’étais embarqué dans un travail impossible. C’était juste pour diviser le temps, le verser dans une tâche de la même façon qu’avant je mesurais un liquide, des granules, en les versant dans un récipient gradué. Depuis que la terre a été vendue, depuis que les dernières bêtes sont parties, ce que je fais ne compte plus. Il n’y a que l’argent qui travaille maintenant. Les dettes se bouffent entre elles. Je n’avais plus le courage de continuer. (…) »

    (extrait des pages 66 à 68) 

    Philippe Annocque a fait une belle recension du recueil de Munn sur son blog littéraire « Hublots« , et Yvain également sur son blog littéraire « Lyvres« .
  • Le portique du front de mer

    juin 10th, 2014
     Manuel Candré, “Le portique du front de mer”, éd. Joëlle Losfeld, 2014 — extraits des pages 36 à 39.

    « (…) Les villas les plus improbables s’étaient construites au cours des années passées, parsemant la ville et la côte d’une épaisse couche d’architecture flamboyante ou à l’austérité minimale, blanche et de toutes les couleurs, à étage, à demi enfouies dans le sol de sable comme des bunkers abandonnés. Beaucoup d’entre elles, pour répondre à un genre de mode, étaient de nature protensensibles, c’est à dire que l’ensemble des portants réagissait à la chaleur ou aux émotions de leurs occupants.
    (…)
    Joao nous dit une fois avoir assisté à la mort d’une de ces maisons, mais je ne saurai lui donner crédit de tout. L’une d’elles, particulièrement, qui s’était effondrée sur ses occupants, repliant dans une crispation réflexe ses voiles de métal, broyant en une seconde une famille de six, la mère, le père et quatre enfants. On ne sut pas dire ce qui avait pu provoquer ce repli fatal amis dès lors on considéra qu’il valait mieux solder l’engouement pour les villas protosensibles et pour ce qui restait de ces dernières les figer de manière irréversible en mode non actif. À partir de ce moment, la ville s’empesa d’une langueur croissante, que vint alimenter le mal des plages à sa façon, par exemple on se promenait dans les rues mais plus rien ne respirait, tout s’était figé dans un silence pénible que rien ne venait plus faire fibrer. Jamais (…) »

  • Le tango immobile des écrivains #1

    juin 8th, 2014
    Un écrivain des champs a l’odorat si développé qu’il peut convoquer des souvenirs d’enfance autour d’un panier d’amandes si vous présentez la bonne odeur à son nez.
    Notez qu’un écrivain des villes aussi peut convoquer des souvenirs d’enfance, à cela près qu’à l’issue du blind test, ce dernier aura une furieuse envie de s’acheter un pot de colle Cléopâtre.
  • Vaines épigrammes et pauvres aphorismes #2

    juin 7th, 2014
    « Si tu veux tester les compétences d’une voyante, emmène-la dans ton hypermarché le plus proche et fais-lui choisir une file d’attente aux caisses. »
  • Isabelle Damotte #1

    mai 21st, 2014
    Isabelle Damotte, De l’enfant, inédit 2014

    « (…) De l’enfant, on peut dire qu’il avait presque trois ans quand il est arrivé. Il ne savait ni les jouets ni les livres ni les mots des chansons qu’on dit en caressant le front, en creusant au creux des genoux la chute, le bateau qui chavire. Tu payes ou tu payes pas ? pas.

    On peut dire qu’on pouvait le coucher même toute la journée, jamais de lui-même il ne quittait son lit. On peut dire qu’il souriait… Il embrassait maman ou bien la dame et l’on pouvait partir et revenir, jamais il ne se retournait. A tout à l’heure, il répétait.

    De l’enfant, on peut dire qu’il se tenait raide dans les bras et n’aimait pas la tête en bas, ou être tout là haut sur les épaules. On peut dire qu’il n’aimait pas marcher dehors. On peut dire la terreur de la douche, et les tremblements de tout le corps.

    De l’enfant, on peut dire qu’il était beau et attirait la sympathie. On peut dire qu’on a voulu lui apprendre les couleurs, et que la cuillère rouge est devenue la rouge. (…) »

  • Trouver en soi une tombe

    mars 31st, 2014
    « (…)Je ne savais pas vraiment avant d’entrer ce qu’il me fallait jouer comme morceau. Mon grand-père avait tellement aimé l’ailleurs et avait si peu pu le vivre qu’il était devenu garde-barrière. Sa maison est toujours intacte, près de la voie ferrée. Le jardin en triangle, le garage en tôle, le crépi que la SNCF n’a jamais refait. Il lui fallait une chanson qui dise « tu vas sauter dans un bus et tu vas voir tout ça, et ça, et ça ». Tu vas sauter dans l’infini. Il n’y aura que des arrêts différents. Que des nouveaux paysages. Il n’y aura aucune putain de barrière et t’auras pas besoin de ticket, ou de ta carte de membre de l’équipe. On ne te demandera plus rien. Le monde sera tout entier à toi, et dans le même temps il te foutra une paix monumentale. (…) »

    Al Denton


    (Extrait d’une nouvelle lue sur son blog Le verbe est une maladie de la lumière)
  • Nouvelle parution

    mars 8th, 2014
    au tournant du siècleJe suis heureuse (et fière) d’apprendre aujourd’hui que paraît un essai sur la poésie contemporaine aux éditions Seghers. Il s’intitule « Au tournant du siècle, Regard critique sur la poésie française contemporaine », est rédigé par Jean-Luc Maxence, et abrite quelques poètes de ces dix dernières années. Je le remercie vivement de m’inclure dans cette liste d’auteurs contemporains.
  • On a tous quelque chose en nous de Collodi

    février 18th, 2014
    « (…) Le lendemain, au lever du jour, ils arrivèrent sans encombre au pays des Jouets. Ce pays ne ressemblait à aucun autre. Il n’y avait que des enfants. Les plus vieux avaient quatorze ans, les plus jeunes à peine huit.
    Dans les rues ce n’étaient que bonne humeur, tapages et cris à vous crever le tympan ! Des bandes de gamins partout jouant aux osselets, à la marelle, au ballon, faisant du vélo ou du cheval de bois, ayant organisé une partie de colin-maillard ou se courant après.
    Certains chantaient, d’autres faisaient des sauts périlleux ou s’amusaient à marcher sur les mains.
    Un général au casque fabriqué avec du feuillage passait en revue un escadron en papier mâché. On riait, on hurlait, on s’appelait, on battait des mains, on sifflait, on imitait le chant de la poule venant de pondre un œuf…

    Le boucan était tel qu’il aurait fallu se mettre du coton dans les oreilles pour ne pas devenir sourd. Sur chaque place, il y avait un spectacle sous tente qui attirait tout au long de la journée une foule d’enfants et sur les murs des maisons on pouvait lire, tracées au charbon, de jolies choses comme : « Vive les joués » (au lieu de « jouets »), « on ne veu plus des colles » (au lieu de « On ne veut plus d’école »), « A bas Lari Témétique » (« au lieu de « À bas l’arithmétique »), et autres perles de ce genre.

    Pinocchio, La Mèche et tous les enfants qui étaient dans la charrette du petit homme se fondirent dans cette cohue dès qu’ils furent dans la ville et ils n’eurent aucun mal, comme on peut le deviner, à devenir les amis de tout le monde. Impossible d’être plus heureux qu’eux !
    Jeux et divertissements ne cessant jamais, les heures, les jours et les semaines filaient à toute vitesse.

    — Quelle belle vie ! S’exclamait Pinocchio chaque fois qu’il croisait La Mèche.
    — Tu vois que j’avais raison, répliquait l’autre. Et dire que tu ne voulais pas venir ! Que tu t’étais mis dans la tête de retourner chez la fée et de perdre ton temps à étudier ! Si aujourd’hui tu ne t’ennuies plus avec les livres et l’école, c’est bien grâce à moi et à mes conseils, d’accord ? Seuls les vrais amis savent rendre de tels services.
    — C’est vrai ! Si je suis enfin content, c’est à toi que je le dois. Quand je pense à ce que me disait le maître en parlant de toi… Tu sais ce qu’il me disait ? Il me disait toujours : « Ne fréquente pas ce fripon de La Mèche ! C’est un mauvais compagnon qui ne peut que t’attirer sur la mauvaise pente. »

    (…) Cinq mois passèrent ainsi, à s’amuser jour après jour sans jamais voir ni livre ni école. Puis, un matin, en se réveillant, Pinocchio eut une fort désagréable surprise qui le mit hors de lui. (…) Il découvrit, à son grand étonnement, que ses oreilles avaient poussé au moins de la longueur d’une main. (…) Il chercha immédiatement un miroir pour se regarder. N’en trouvant pas, il remplit d’eau une cuvette pour la toilette et, se mirant dedans, vit ce qu’il n’aurait jamais voulu voir. C’est à dire sa propre image agrémentée d’une magnifique paire d’oreilles d’âne. Je vous laisse imaginer la souffrance, la honte et le désespoir du pauvre Pinocchio !
    Il commença par pleurer, gémir et se cogner la tête contre un mur. Mais plus son désespoir grandissait, plus ses oreilles s’allongeaient et se recouvraient de poils.

    Alertée par ces cris aigus, une jolie petite marmotte qui habitait l’étage au-dessus entra dans la pièce. Voyant la grande agitation de la marionnette, elle lui demanda avec empressement :
    — Que se passe-t-il, cher voisin ?
    — Je suis malade, petite marmotte, très malade. Et malade d’une maladie qui me fait peur ! Tu sais prendre le pouls ?
    — Un peu.
    — Alors, dis-moi si j’ai de la fièvre.
    La marmotte prit le pouls de la marionnette avec l’une de ses pattes de devant et lui dit en soupirant :
    — Hélas, mon pauvre ami, j’ai une mauvaise nouvelle à te donner.
    — C’est à dire ?
    — Tu as une méchante fièvre.
    — Mais de quelle sorte de fièvre s’agit-il ?
    — Tu as une fièvre de cheval, ou plutôt d’âne.
    — Je ne comprends rien à ce que tu dis, répliqua la marionnette qui avait trop bien compris.
    — Je vais donc t’expliquer. Dans deux ou trois heures tu ne seras pas plus une marionnette qu’un petit garçon.
    — Et que serais-je ?
    — D’ici deux heures ou trois tu deviendras un bourricot, un vrai, comme ceux qui tirent les carrioles ou portent choux et salades au marché.
    — Oh, pauvre de moi ! Pauvre de moi ! hurla Pinocchio en saisissant ses oreilles à pleines mains, tirant dessus et essayant de les arracher rageusement comme si ce n’étaient pas les siennes.
    — Mon ami, intervint la Marmotte pour le calmer, que cherches-tu donc à faire ? Tu n’y peux rien ! C’est le destin ! Il est prouvé scientifiquement que tous les enfants paresseux qui rejettent les livres, l’école et les maîtres, qui passent leurs journées à jouer et à se divertir, deviennent tôt ou tard des petits ânes.
    — C’est prouvé ? questionna la marionnette en sanglotant.
    — Hélas, oui ! Et désormais les pleurs sont inutiles. Il fallait y penser plus tôt.
    — Mais ce n’est pas de ma faute, crois-moi, petite Marmotte, c’est à cause de La Mèche !
    — La Mèche, qui est-ce ?
    — Un copain d’école. Moi, je voulais rentrer à la maison, je voulais être obéissant, je voulais étudier et me distinguer… Mais La Mèche m’a dit : « Pourquoi t’embêter à travailler ? Pourquoi aller en classe ? Viens plutôt avec nous au pays des Jouets. Là-bas, on n’étudie pas, on s’amuse du matin au soir et on est toujours joyeux. »
    — Pourquoi avoir suivi les conseils de ce faux ami, de ce mauvais compagnon ?
    — Pourquoi ? Parce que, petite Marmotte, je suis une marionnette sans cervelle… et sans cœur. Si au moins j’avais eu un peu de cœur, je n’aurais pas abandonné ma bonne fée qui m’aimait comme son propre enfant et qui a tant fait pour moi ! À cette heure, je ne serais plus une marionnette mais un vrai petit garçon, comme tous les autres. Oh ! Si jamais je rencontre La Mèche, gare à lui ! Je lui dirai ses quatre vérités. » (…) »

    Carlo Collodi, « Pinocchio » — éditions Rue du monde, 2009, extrait p.147-153
    (Publié d’abord en feuilleton dans le « Glornale per i Bambini » ( Journal des Enfants ) de Ferdinando Martini en 1878)
  • Vaines épigrammes et pauvres aphorismes #1

    novembre 23rd, 2013
    A la sainte Catherine (de Rambouillet), tout Boileau prend Racine.
←Page Précédente
1 … 12 13 14 15 16 17
Page Suivante→

Créez un site ou un blog sur WordPress.com

 

Chargement des commentaires…
 

    • Suivre Abonné∙e
      • Anna de Sandre
      • Rejoignez 64 autres abonnés
      • Vous disposez déjà dʼun compte WordPress ? Connectez-vous maintenant.
      • Anna de Sandre
      • Modifier le site
      • Suivre Abonné∙e
      • S’inscrire
      • Connexion
      • Signaler ce contenu
      • Voir le site dans le Lecteur
      • Gérer les abonnements
      • Réduire cette barre